THÈME LE POPULISME - Entretien avec M. Bertrand Badie 2/3
- Archium
- 13 juil. 2020
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 sept. 2020

On constate partout dans le monde et plus particulièrement en Europe la montée et parfois le succès de partis populistes comment expliquer une telle ascension ?
« Le populisme est un concept redoutable parce que lui aussi est très polysémique et difficile à définir. Mais il y a un point, ou tout le monde s’accorde c’est qu’il faut le considérer comme un symptôme d’une crise institutionnelle profonde. Il monte quand les institutions chutent, quand les individus ne se retrouvent plus dans l’ordre institutionnel. Donc actuellement, ce qu’il se passe, c’est un double mouvement, qu’il faut suivre de près : un défaut de confiance dans les institutions, et deuxième élément, c’est que cette vague se développe face à des institutions nationales qui ont perdu la confiance des populations.
Face à une mondialisation qui inquiète, un parfum nationaliste émane des populistes qui évoque en réalité quelque chose de beaucoup plus profond qui est l’obsession de fermeture face aux effets jugés néfastes, incertains, voire dangereux de la mondialisation. Chez les radicaux, cela se traduit par un identitarisme militant, c’est-à-dire, n’ont seulement fermer les frontières, mais aussi fermer les identités. Pour se renfermer dans les racines religieuses, culturelles ou raciales qui rassurent ceux qui ont très peur ».
Comment endiguer ce phénomène ?
« Cette duplicité des populistes rend d’autant plus difficiles les efforts qui visent à l’endiguer, il ne va pas juste s’agir de restaurer des institutions, mais il s’agit d’habiller, d’orienter la mondialisation vers des sentiers politiques plus rassurants et juste, c’est un travail colossal. Autrefois, on pouvait se battre contre le populisme à travers l’arme de la démocratie aujourd’hui, il faut redéfinir la mondialisation ».
[Ce qui explique que l’Union européenne soit la cible privilégiée des populistes…]
« Oui, car le populisme est une critique à l’égard des institutions, de la mondialisation donc ces formes intermédiaires de construction régionales. Mais il y a une contradiction, car ces mouvements populistes blâment l’Europe, dénoncent son incapacité à protéger les Européens contre différents risques. Mais en parallèle, refuse de donner des moyens pour combattre ces fléaux.
Par exemple dans le cadre de la crise du Covid 19, il est remarquable de constater que la première réaction de l’Europe a été celle de l’inertie, comme le démontre le discours de madame Lagarde, en effet selon elle chaque État devait seul prendre des mesures propres à combattre le virus. Puis apparait une lueur d’espoir quand on évoque la mutualisation de la dette, ce qui est bon signe, on s’engage enfin dans une Europe plus solidaire. On sort de l’Europe simplement associative. Si l’Europe est capable de surmonter cette crise à partir d’un effort de solidarité peut-être, aura-t-elle pu vaincre la malhonnêteté du discours populiste qui accuse en même temps l’Europe d’impuissance et ne veut pas lui donner les moyens de sa puissance ».
Comments